Comment les émissions des avions contribuent au réchauffement ?
Le trafic aérien contribue jusqu’à 20% au réchauffement dans certaines régions de l'Arctique.
Rex Dalton - Le 21 décembre 2009 - Nature
Les émissions des avions pourraient avoir un effet dramatique sur le réchauffement de l’Arctique. Magurean/iStockphoto
La première analyse des émissions provenant des vols commerciaux montre qu'elles sont responsables de 4 à 8% du réchauffement de la surface du globe depuis que les enregistrements des températures atmosphériques de surface ont commencé en 1850 - ce qui équivaut à une augmentation de température de 0.03 à 0.06 ° C en général.
L'analyse, par des scientifiques, spécialistes de l’atmosphère à l'Université de Stanford à Paolo Alto, en Californie, montre aussi que dans l'Arctique, les traînées de vapeur produisent 15 à 20% du réchauffement.
Les résultats de cette analyse sont susceptibles d'être largement étudiés puisque certains pays tentent d'aborder l'impact de l'aviation commerciale sur le réchauffement climatique. Il y a environ 35 millions de vols commerciaux chaque année. Des études ont été menées en Europe, les compagnies aériennes y sont soumises à une pression accrue car des dirigeants européens envisagent la perception d'une taxe carbone sur les émissions des avions. Mais aux États-Unis, la recherche est peu avancée sur le sujet. Des études antérieures ont seulement évalué les incidences de l'aviation commerciale, mais c'est la première utilisation de données sur les émissions réelles - de 2004 à 2006 - pour calculer le réchauffement dû à ces vols, explique Mark Jacobson, un ingénieur de Stanford, qui a présenté l'analyse le 17 Décembre à la réunion annuelle de l' « American Geophysical Union » à San Francisco, en Californie.
Dans cette dernière étude, Jacobson et son équipe ont développé un modèle pour les émissions des avions qui tient compte de la composition atmosphérique, des nuages et des propriétés physiques des émissions, en particulier du noir de carbone - une partie importante de la suie. Dans sa présentation, Jacobson a expliqué comment le modèle a été appliqué à une simulation de neuf ans couvrant une période de 2004 à 2013, après l’analyse des itinéraires de vol sur des grilles de 300 kilomètres carrés. Le modèle a permis de calculer les caractéristiques des traînées de vapeur en fonction de la taille réelle des particules émises et de leur évolution au fil du temps.
Perspective « nuageuse »
Beaucoup d'études précédentes ont supposé que l'impact des émissions des avions était le même partout. Mais la nouvelle analyse révèle que les émissions des avions augmentent la fraction des cirrus où les traînées de vapeur sont les plus abondantes, et diminuent même la fraction des cirrus en plusieurs endroits en augmentant les températures de basse atmosphère, et en en réduisant ainsi l'humidité relative. « Si on pouvait diviser par 20 le noir de carbone des émissions de ces avions, le réchauffement serait arrêté et un léger refroidissement se produirait », précise Jacobson.
L’étude de cette équipe a été évaluée par des pairs et devrait être publiée prochainement, a ajouté Jacobson. David Fahey, du laboratoire de recherche sur le système terrestre à Boulder, Colorado - partie de la « National Oceanic and Atmospheric Administration » - estime que des études telles que celle de Jacobson sont importantes pour combler le manque de données sur les émissions des avions aux Etats-Unis, où la recherche est restée « confuse ». Fahey pense qu’à présent que les dirigeants européens appellent à prélever une taxe carbone sur chaque vol commercial, les États-Unis seront poussés à rattraper leur retard dans la recherche sur les émissions des avions. Certaines des propositions de l'UE suggèrent l'imposition d'un vol pour des émissions tout le long de son itinéraire. Ceci est « absurde », dit Fahey. Pour que la taxe soit plus réaliste, une recherche de haute qualité est nécessaire sur l'impact réel de ces émissions, a-t-il ajouté.
http://www.nature.com/news/2009/091221/full/news.2009.1157.html