Les États-Unis excluent les ONG de la rédaction du traité sur l’IA
Luca Bertuzzi | EURACTIV.com | translated by Anna Martino 18 janvier 2023
À la demande des États-Unis, les organisations de la société civile ont été exclues du processus de rédaction du premier traité international sur l’intelligence artificielle afin d’éviter que les positions des différents pays ne soient rendues publiques.
Le Comité sur l’intelligence artificielle (CAI) du Conseil de l’Europe a été chargé d’élaborer une convention fixant un cadre légal contraignant sur l’intelligence artificielle, fondée sur les droits humains, la démocratie et l’État de droit.
Le Conseil de l’Europe, basé à Strasbourg, est une organisation internationale qui compte 46 membres, dont les 27 États membres de l’Union européenne, le Royaume-Uni, la Turquie et l’Ukraine. La Russie en a récemment été exclue. Les États-Unis, le Canada, le Mexique et Israël sont des pays observateurs, non assujettis à l’organe mais habilités à signer certains traités, comme celui sur l’IA.
Lors de la dernière session plénière du Comité en novembre, les États-Unis ont proposé de confier le travail à un groupe de rédaction formé par tous les pays susceptibles de signer le traité, autrement dit une plénière mais sans les groupes de la société civile.
Le représentant américain a explicitement mentionné qu’il ne souhaitait pas divulguer ses positions de négociation à des représentants de la société civile, évoquant le Deuxième Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité comme précédent.
Les États-Unis n’ont peut-être pas intérêt à rendre public le fait qu’ils ont fait pression pour limiter le champ d’application du traité sur l’IA aux seuls organismes publics, excluant ainsi le secteur privé dans lequel les entreprises américaines jouent un rôle de premier plan au niveau mondial.
Le Royaume-Uni et le Canada ont exprimé leur soutien à la proposition américaine concernant un groupe de rédaction. Cependant, puisque la motion n’a pas été approuvée formellement par consensus au cours de la séance plénière, comme c’est habituellement le cas, les participants ont supposé qu’il s’agissait d’une proposition parmi tant d’autres présentées au cours de la discussion.
Cependant, le secrétariat du Conseil de l’Europe a inclus la proposition américaine dans le procès-verbal comme si la décision avait été prise. Selon des sources au fait du dossier, qui se sont confiées à EURACTIV sous couvert d’anonymat, le secrétariat aurait subi des pressions de la part de Washington, car l’institution a un intérêt diplomatique à faire signer son traité par les États-Unis.
La Mission des États-Unis auprès de l’Union européenne a décliné la demande de commentaire de la part d’EURACTIV.